dimanche 11 décembre 2016

Critique d'Apnée de Jean-Christophe Meurisse par Solène Colin




Critique d’Apnée de Jean-Christophe Meurisse

Imaginons-nous une minute en 2050 : les lycéens que nous sommes, sont mariés et même (soyons fous) parents. Si un enfant nous demande de raconter 2016 ou de montrer un film qui illustre notre société, que répondrions-nous ? « Oh, c’était une vie difficile et déprimante, tiens, regarde La Loi du Marché, tu verras ». Ou alors de manière un peu plus positive « On travaillait beaucoup, mais certains étaient là pour nous aider, tiens, regarde l’excellent Toni Erdmann ! ». Ou non, notre choix pourrait s’arrêter plutôt sur un film passé inaperçu, qui présente notre société dans toute son absurde splendeur ! Alors il faut prendre grand sa respiration et on plonge dans Apnée de Jean-Christophe Meurisse. On nous y dépeint notre mode de vie, nos mœurs, nos habitudes, et enfin nous pouvons rire !
Trois amoureux, Maxence, Thomas et Céline (ouais, un trouple quoi) ont un projet pour l’avenir : entrer dans la « norme ». Bon, ils décident d’abord de se marier. Ah zut, en 2016 on ne peut pas se marier à trois. Un appart alors ? 2016, c’est vivre dans un taudis (c’est le mot) à mille euros par mois où « tout est à imaginer », mais pour y vivre il faut gagner trois fois le loyer. Et pour avoir un travail, allons à Pôle Emploi où on nous apprendra à dire bonjour ou à ne pas avoir les mains moites. Et pour monter sa boîte, on peut essayer « La banque qui vous écoute », mais qui n’écoute pas trop quand même…
Jouer avec la naïveté de trois marginaux, avec leur premier degré (enfin à ce niveau c’est peut-être même du degré 0,5) cherchant leur passé en ruine, cherchant une famille,  cherchant à faire partie d’une société aux portes plus qu’étanches : voilà la recette de Meurisse pour croquer l’arrière-plan social et politique en France. Ce qu’il faut finalement pour ses trois utopistes, c’est un certain cynisme. Car rien n’est mieux que de vivre en Diogène, reclus dans un village, de décrocher de sa croix Jésus, sanguinolent,  pour qui il est difficile de marcher  après avoir passé 2000 sans avancer (chacun y lira ce qu’il voudra…), et rien n’est mieux que de transformer un facteur en Bacchus. C’est comme cela que l’on fait des rencontres incroyables : une autruche dans un supermarché vide, un prêtre en guenilles, des invités fous pour un mariage fou. C’est comme cela que l’on se rend compte que la vie normale ne vaut pas la peine d’être vécue, parce que justement on ne vit pas pleinement.
Alors ce film est un mélange de candeur, de désillusion, mais aussi d’allégresse. 2016 c’était comme ça, et s’il faut retenir une chose (difficile à choisir) dans ce film, c’est un message pour 2017 : « Soyons réalistes, demandons l’impossible ! »

Solène Colin, terminale L

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