Le lundi 1er février, les élèves de Seconde de l'option cinéma ont assisté à la projection de deux courts métrages en compétition au festival Premiers Plans :
Le lundi 1er février, les élèves de Seconde de l'option cinéma ont assisté à la projection de deux courts métrages en compétition au festival Premiers Plans :
Le mercredi 27 janvier, les élèves de Première de l'option cinéma ont assisté à la projection d'un film en compétition au festival d'Angers : La Lévitation de la princesse Karnak (2020) d'Adrien Genoudet.
Faire un film c’est dur, surtout quand c’est la première fois.
Reservoir Dogs, Grave ou Citizen Kane en sont de parfaits exemples. Pour d’autres, c’est plus compliqué et La Lévitation de la Princesse Karnak nous le rappelle sans difficulté.
Dommage qu’après une première scène extrêmement prometteuse, le spectateur se retrouve désemparé face à la débâcle qu’est le film. Sans même entendre les personnages parler, le ton fade, la photographie digne d’un iPhone 1 et la lumière disgracieuse attaquent la rétine sans justification.
Le film est trop écrit, transformant chaque dialogue en calvaire et chaque monologue en supplice. La seule tirade crédible est mal jouée : dommage que le réalisateur ait décidé de s’offrir le rôle, il n’est bon que derrière la caméra (et encore).
Dommage qu’aucun de ses effets de style ne serve le propos du film, mais toujours l’ego du metteur en scène.
Enfin, le genre est mal choisi. Le film entier se concentre sur la relation entre les deux personnages, l’aspect fantastique de la pandémie et des disparitions servant seulement de toile de fond à l’histoire. C’est donc très surprenant que la fin du film nous montre une disparition frontale et concrète d’un personnage qui, après avoir erré beaucoup trop longtemps dans un décor naturel, économisant certainement quelques milliers d’euros et l’équipe technique, s’évanouisse dans un fondu enchaîné infect.
Le plan final est semblable au reste du film : un mur plat, blanc, ennuyeux et dont les quelques reliefs nous font mal au dos.
ADOLESCENTES (2020)
de Sébastien Lifshitz
En ce début
d’année je suis allé à l’Escurial, avec mon groupe de cinéma, voir le
documentaire de Sébastien Lifshitz Adolescentes, où ce dernier a filmé
pendant cinq ans de 2013 à 2018, deux adolescentes de la 4ème et la
terminale. Ce sont donc de jeunes femmes nées en l’an 2000. Il se trouve que je
fus assez surpris par la manière dont Lifshitz a réalisé son documentaire et dont
il a représenté et su mettre en scène des thématiques importantes ainsi que la
représentation de ces deux filles. Il y a donc de nombreuses choses à dire sur
ce film tant sur le fond que sur la forme. Cela m’a donné envie de les exprimer
par écrit à travers différents aspects.
Un documentaire très original
Vous voyez les
films de fiction qui se font passer pour des documentaires, afin de
renforcer le réalisme de l’histoire et
vous voyez les documentaires qui se font passer pour des fictions. Il se trouve
que pendant toute la séance, je croyais comme beaucoup de camarades que le film
se rangeait dans la deuxième catégorie. Je pensais que c’était comme le film de
Richard Linklater Boyhood sorti en
2014, une fiction où le réalisateur a filmé les mêmes acteurs pendant douze ans
entre 2001 et 2013, où l’on voit les mêmes enfants grandir. Et bien il se
trouve que non. J’ai découvert qu’il s’agissait bien, en fait, d’un documentaire
en lisant le générique. Les deux filles n’étaient pas des actrices, mais bel et
bien des personnes réelles. Ce fut frappant pour moi. Ce film se rangeait donc
dans la première catégorie, car
Lifshitz a employé un découpage qui me semblait être peu probable pour les
conversations qu’entretenaient les personnes, notamment les nombreuses disputes
entre Emma, l’une des adolescentes, et sa mère, car la plupart des conversations
étaient coupées et se présentaient donc à travers différents plans, à
différentes échelles. On pouvait retrouver les deux personnes sur le même cadre
en train de se disputer et soudain l’une des personnes commence à s’exprimer et finit ce qu’elle a à
dire sur un gros plan. C'est-à-dire quand l’on cadre seulement la tête de la
personne. On voit cela très rarement dans
un documentaire. Non seulement les gros plans sont plutôt propres à la fiction,
on a peu l’habitude de voir ça dans le documentaire et on a encore moins
l’habitude de voir une conversation découpée et qui alterne des plans
différents, éloignés/rapprochés, car généralement, on s’intéresse simplement aux
propos dans la plupart des documentaires.
C’est pour cela
qu’Adolescentes
va encore plus loin que les autres documentaires puisque le réalisateur lui
donne de véritables qualités artistiques : le film se présente
esthétiquement plus beau, à travers une mise en scène élaborée, bien travaillée.
Ce qui nous donne naturellement une impression de fiction. Nous voyons donc
bien qu’à travers la mise en scène et les différentes techniques artistiques
employées, Sébastien Lifshitz apporte une image de fiction, et donc une
grande originalité à ce film documentaire.
Mais en plus de la mise en scène frappante, il y a aussi l’intimité qui nous laisse dans le doute, car la manière dont on pénètre l’intimité de ces deux filles est incroyable lors des conversations et des nombreuses disputes qu’elles ont avec leurs parents. On peut se demander comment elles ont pu autant exposer leur vie privée face au réalisateur. Dans un premier temps, nous nous disons que c’est une fiction par la manière dont on touche à l’intimité. On trouve, dans un premier temps, que les comédiens ont livré un jeu extrêmement réaliste, comme le passage où Emma pleure après une dispute avec sa mère au sujet d’un examen de solfège qu’elle ne veut pas passer. On se dit que c’est un très bon jeu, mais non, il s’agit bel et bien de vraies émotions, surtout les conversations qu’elles ont autour de la sexualité que je vais détailler davantage dans les parties suivantes.
Tout paraît trop intime pour être réel d’où cette impression
de fiction. Mais pourtant, c’est bien le cas, et en le découvrant, c’est comme de
se prendre une véritable claque à la fin de la séance, et je réalise à quel
point ces deux adolescentes ont été courageuses d’autant exposer leur vie
privée. A leur place, je pense que j’aurais refusé, beaucoup auraient refusé.
Il y a aussi
d’autres éléments comme le fait que le logement d’Anaïs et de sa famille prenne
feu. Cela aurait pu simplement nous donner l’impression que c’était mis en scène
pour faire avancer le récit dans le film. Mais encore une fois c’était bien
réel.
Si j’ai abordé le film comme une fiction
qui se fait passer pour un documentaire, ce n’est pas pour rien. Si dans un
premier temps, le film donne une impression de fiction, il donne surtout celle
d’une fiction qui se fait passer pour un documentaire, d’où l’immense
originalité de ce documentaire. On doit pouvoir trouver d’autres documentaires qui
tentent de se faire passer pour un film de fiction.
C’est un
documentaire qui se fait passer pour une fiction qui essaierait de se faire
passer pour un documentaire. C’est pratiquement du jamais vu, car même si on a
l’impression qu’il s’agit d’une fiction à cause de la mise en scène, le
réalisateur aborde des thèmes importants d’une manière très simple et nature.
Le film n’est pas romancé, on ne cherche pas à dépasser le cadre réaliste, et ce, malgré une mise en scène digne d’une fiction. Le film n’est pas construit comme
tel. Si le film avait réellement été une fiction, on aurait pu parler d’un jeu
documentaire pour les comédiens tant il est réaliste. Mais ce n’est absolument pas le cas puisque ce ne sont pas des acteurs,
mais bien des personnes réelles. Ainsi la bonne caractérisation de ce film
serait pour moi un documentaire qui essaie de se faire passer pour un faux
documentaire. Je pense qu’en matière de documentaire, nous frôlons bien l’originalité.
Un film construit autour d’une opposition
Ainsi le film
présente Emma et Anaïs, deux adolescentes qui sont très proches l’une de
l’autre, de vraies meilleures amies. Pourtant elles ont beau être très proches,
elles sont très opposées.
Le film repose donc sur l’opposition
entre ces deux filles.
Lifshitz dresse des portraits qui tantôt vont
favoriser l’une et tantôt favoriser l’autre.
Tout d’abord,
ce qui favoriserait Anaïs par rapport à Emma, c'est qu'on découvre très rapidement
que dans le cadre de son statut populaire, Anaïs doit se débrouiller toute
seule. La difficulté de son milieu social renforce sa débrouillardise, et par conséquent
lui donne une certaine maturité, notamment parce qu’elle est entourée de
parents incapables de bien s’occuper de ses frères. Ce qui fait que la
responsabilité de ses frères, dont l’un en
plus est malade, repose sur elle. Elle devient en quelque sorte la maîtresse de
la maison et cela lui donne une certaine force. D’ailleurs, il est dramatique
de voir, qu’au moment de l’incendie du logement, elle se sent coupable parce
que, cette fois-ci, elle n’a pas surveillé son frère. C’est triste et ça montre
en même temps la maturité d’Anaïs.
Cela défavorise
Emma dans un sens, car le fait qu’elle soit fille unique et qu’elle vive dans un milieu assez confortable, ne lui
donne pas un rôle très important. C’est pour cela qu’elle nous paraît un peu
moins mature, notamment par son caractère dur et un peu insolent envers sa
mère (à noter que sa mère paraît assez pénible aussi par l’image hautaine
qu’elle donne, et par le fait qu’elle parle sans arrêt des études). Même si la
mère et la fille sont proches, on remarque une certaine distance affective. De
plus, Anaïs semble plus joyeuse et plus sociable, c’est d’ailleurs la première
des deux qui finit en couple, dès la 3ème, avec un garçon nommé Dimitri, tandis qu’Emma
paraît plus froide et discrète. Mais cela produit un certain charme.
D’autre part, le réalisateur tend vers une
idéalisation des jeunes femmes, ce qui, cette fois-ci, favorise Emma par
rapport à Anaïs, car il semble insister sur le physique de ces filles. Ainsi,
Emma est mince et belle, d’où une utilisation de plans rapprochés sur elle et
sur son visage. Sa beauté est donc mise
en avant.
Dès le début du
film, on voit qu’Emma est sensible à l’art, car elle chante dans un conservatoire.
C’est l’une des plus belles scènes de ce documentaire, car là on sent une
véritable grâce et une idéalisation de la beauté. Elle passe par le désir de
devenir actrice et elle finit par être acceptée dans une licence de cinéma à
Paris 8. Qui sait, on la retrouvera peut-être en train d’écrire des critiques
de films dans les Cahiers du Cinéma ? Sa beauté mise en avant, son grand rapport à
l’art, son passage vers les études générales, tendent à l’idéaliser.
L’idéalisation de la beauté renforce peut-être aussi cette impression de voir
une fiction.
Cependant, Anaïs
n’est pas tellement favorisée par son physique, elle n’a pas un très beau
visage et elle est assez ronde. Il y a même une conversation amusante à ce
sujet avec sa mère. Et le fait que malgré une certaine maturité, elle fait
parfois preuve d’immaturité au niveau de son comportement. On apprend que toute
petite, elle avait été mise en famille d’accueil parce qu’elle insultait sa
mère, mais cela est probablement dû à son milieu social défavorisé. Dans le
lycée professionnel où elle étudie, elle participe au bazar des cours, tandis
que dans le lycée général d’Emma, tout semble calme. Par son physique désavantageux
et cette immaturité, bien que ce soit la plus mature des deux, elle donne une
image de vulgarité, opposée à celle d’Emma. Comme nous avons pu le voir, le
réalisateur a quand même présenté les atouts et les carences de chacune des
deux adolescentes.
Le sexe
évidemment
Pour que le
film ait été aussi intime, le réalisateur a bien évidemment abordé la sexualité
de ces adolescentes. On se plonge vraiment dans l’intime. C’est ainsi qu’un
garçon ou un jeune adulte né dans les générations précédentes, en apprend sur
les filles et on peut en être fascinés. C’est assez amusant tout en étant
intéressant, car le réalisateur montre l’évolution de ces filles par rapport à
ce sujet. Ainsi au début, elles se demandent à quel âge il faut qu’elles le
fassent. Puis on avance et elles commencent à confier leur désir, en se demandant quel garçon serait le meilleur partenaire sexuel. A travers un plan qui est à
mon avis le plan le plus documentaire du film, car elles sont filmées de dos,
où Emma raconte à deux copines du lycée que ce serait pénible de coucher avec
l’un parce qu’il est imberbe ou l’autre parce qu’il est trop poilu. Je pense
qu’elles ont été filmées de dos, pour ne pas que l’on sache précisément qui a dit quoi
sur tel garçon (une petite pensée pour les garçons qui se sont reconnus dans
cette conversation). Puis vers la fin du film, Emma fait part de sa première relation
sexuelle, qui donne un aspect sociologique au film, que nous allons voir dans
les parties suivantes. Elle raconte l’expérience à sa copine de manière plutôt
timide et en même temps elle sait qu’elle est filmée pour un documentaire.
Un film qui explore
la psychologie des filles
En fait, cela concerne surtout Anaïs. A travers sa mise en scène, Lifshitz nous montre la psychologie d’Anaïs, de manière implicite. Il est déjà intéressant de noter qu’elle a le désir de s’occuper d’enfants quand elle sera plus grande. Elle suit une formation professionnelle pour ça, ce qui se rapporte bien au fait qu’elle s’occupe tout le temps de ses frères. A mon avis, le désir est né de ça. De plus, on la voit faire un stage professionnel dans une maison de retraite et à la fin la directrice lui demande si elle a apprécié, et elle dit qu’au début elle n’aurait jamais pensé vouloir s’occuper de vieilles personnes, mais que finalement elle adore ça. Et comme par hasard, cela se passe peu de temps après la mort de sa grand-mère. On voit donc implicitement la volonté de combler un vide de sa part, lié à la disparition de sa grand-mère. Le réalisateur arrive donc à montrer la psychologie d’Anaïs de manière simple, implicite, et par une bonne mise en scène.
Un film
sociologique et politique
Vers la fin du
documentaire, Emma raconte sa première relation sexuelle à une camarade du
lycée. Elle semble ne pas l’avoir tellement appréciée puisqu’elle précise qu’elle
n’aime pas qu’on la touche. Mais ce qui est le plus surprenant et le plus
dramatique, c’est qu’elle dit que même si elle n’a pas tellement apprécié, elle
est capable de se soumettre et de faire comme tout le monde. C’est ainsi que le
réalisateur met en avant un problème social lié au sexe. A travers ces propos inquiétants, on constate que les
filles, vers la fin de l’adolescence, n’ont peut être pas de relations
sexuelles parce qu’elles le désirent, mais parce qu’elles veulent suivre la
norme. Le portrait de cette fille devient encore plus intéressant, car il serait
en fait le portrait général de la plupart des jeunes femmes, surtout celles nées
au tout début des années 2000. Il y a aussi d’autres problèmes ou phénomènes
sociologiques qui sont mis en avant. On voit bien qu’Emma vit dans un milieu
confortable, élevée par une mère, contrôleuse fiscale, elle suit un parcours
scolaire général, afin de mener de longues études, plutôt intellectuelles pour avoir
à son tour un niveau de vie élevé.
A
l’inverse, Anaïs grandit dans un milieu
populaire avec des parents dont on devine facilement qu’ils ne gagnent pas très
bien leur vie. Ils présentent des difformités physiques : la mère et la
fille sont assez grosses, le peu de dents abimées qu’il reste au père est probablement
lié aussi à des problèmes de santé qu’ils n’ont pas les moyens de régler. Anaïs, quant à elle, suit une formation professionnelle, assez peu intellectuelle. Elle
va donc rapidement travailler et avoir le même niveau de vie que ses parents. On
observe donc dans le film le phénomène de reproduction sociale, qui est le fait
que ceux qui ont des positions dominantes (Emma et ses parents) ou pas (Anaïs
et ses parents) dans la société, les conservent aux générations suivantes.
Ces conditions
sociales mettent en relief l’aspect politique du film. On voit bien que durant
le second tour de la présidentielle en 2017, Emma et ses parents souhaitent que ce soit Macron qui soit élu. C’est l’inverse pour Anaïs et sa famille qui souhaitent
que ce soit le Pen. On comprend donc bien que les milieux populaires votent trop
souvent pour le Front National, parce qu’ils se sentent délaissés et que ce
n’est pas forcément une question de racisme. Un peu plus tôt, dans le
documentaire, on voit que juste après l’attentat de Charlie Hebdo, en janvier
2015, alors que les Français sont un peu secoués, Anaïs, lors d’une conversation avec ses
parents à table, défend les musulmans parce qu’elle explique qu’ils n’ont rien
avoir avec ces actes terroristes, les auteurs étant des islamistes. En
faisant cela, on comprend bien que ce n’est absolument pas une fille raciste. Si
elle est pour Le Pen, c’est simplement parce qu’elle pense que celle-ci va aider
socialement ceux qui sont dans le besoin comme elle. Elle est en fait un peu
comme ces électeurs du PCF qui furent déçus par ce parti dans les années 80,
qui par son alliance avec le gouvernement Mitterrand, ne les a pas tellement
servis, et qui se sont donc tournés vers le FN pensant que ce parti allait les
aider. Elle pense que ce n’est certainement pas Macron qui va les aider. D’ailleurs,
dès qu’elle voit qu’il est élu, elle le traite de « connard » : ce qui
est intéressant, c’est que dès l’élection de Macron, les colères sociales étaient
déjà pressenties et éclateront peu de temps après avec les grandes
manifestations des gilets jaunes qui ont débuté en octobre 2018.
Je dirais donc
que ce film nous invite donc à revoir le jugement que nous avons, nous, Parisiens, sur les gens de la province (car j’ai oublié de préciser que c’est le portrait
de filles qui habitent en province). Nous avons tendance à les catégoriser
rapidement, sans peut-être même prendre en compte leurs conditions de vie et le
fait qu’ils soient quand même assez délaissés.
Je finirai donc
par dire qu’Adolescentes est un documentaire assez original et beau, mis en scène comme une fiction, esthétique et bien travaillé. Il est assez riche et
intéressant par ses nombreux aspects, politiques, sociologiques, psychologiques,
et parce que l’on découvre bien l’un des premiers portraits de jeunes femmes nées en
l’an 2000.
Roméo C. Élève de terminale
Les élèves de Terminale
de l’option cinéma participent au César des lycéens. Dans ce cadre, ils doivent
voir les cinq films en compétition dans la catégorie « Meilleur
film », pour pouvoir ensuite voter pour l’un d’entre eux.
Les films en compétition
sont les suivants :
La clôture des votes aura lieu, pour les lycéens comme pour les votants professionnels, le
vendredi 12 mars.
Les élèves de Première de l'option cinéma ont travaillé sur le scénario et le découpage d'une séquence de film célèbre pour en proposer une nouvelle version.
Voici le travail de Simon et Erwann, à partir du film Le Bon, la Brute et le Truand (1966) de Sergio Leone :
Et la version re-tournée par Simon et Matisse (avec Apolline dans le rôle de Wendy) :
Projection du film Olga d'Elie Grappe, dans un premier montage
Au Lycée Rodin, le lundi 2 novembre 2020
Compte rendu de la séance de Cinéma-Audiovisuel avec Rob, compositeur de musique de film
Rob (Robin Coudert) est compositeur de musique de film, notamment de la série très connue Le bureau des légendes.
I. Son parcours :
Quand il était petit, il a appris à jouer de la trompette. Il n'a pas fait de conservatoire* ni d'école de musique. Il joue du hard rock, de la funk... et a été membre du groupe Phœnix (au clavier). C'était les débuts de la French Touch (Daft Punk...), et un label lui a donné de grosses sommes d'argent pour composer des albums. Il en a sorti (dont Don't Kill), a fait des concerts, de la scène, mais ça n'a pas très bien marché. Rob explique cela parce qu'il faisait de la musique instrumentale, avec des synthés et beaucoup de réverb, des chorales par moment. Ses musiques « étranges » n'ont pas marché à la radio, ni dans les concerts. En parallèle, Rob a fait les Beaux-Arts, et voulu devenir peintre. Il a rencontré Maria Larrea (devenue son épouse), qui faisait des études de cinéma à la fac et qui lui a fait découvrir le métier de compositeur de musique de film : les musiques de Rob sont étranges, évocatrices, sentimentales, exactement ce que le cinéma demande. Rob a composé pour un film d'auteur (franco-allemand), puis pour un film d'horreur. C'est un grand écart émotionnel, et on lui a proposé tout ce qu'il y a entre les deux.
*Après réflexion, Rob trouve que le Conservatoire (qui a ouvert un parcours spécial musique de film), forme des personnes, comme s'il y avait de la musique savante et les autres. De plus, il trouve que cela limite la créativité.
II. Son métier :
* Les relations avec le cinéma :
Rob veut apporter au film quelque chose de très personnel qui n'est pas écrit dans le script, et qui n'est pas montré à l'écran. Il veut apporter une deuxième profondeur au film. Les trois piliers d'un film sont :
– le réalisateur (c'est un peu le « chef », le « dieu tout puissant »)
– le producteur
– le compositeur (« le troisème auteur du film », qui apporte une touche artistique)
C'est le choix du réalisateur de prendre une musique simple ou mémorable pour son film. Selon Rob, une bonne musique de film, c'est quand il y a un bonne relation entre les artistes, une alliance entre le compositeur et le réalisateur (qui est souvent effrayé par la musique car quelquefois il n'y connaît rien).
Dans la musique de film, il y a trois catégories :
– la musique originale : le compositeur écrit les musiques pour le film (comme Rob)
– les morceaux : le producteur achète les droits des musiques et les met dans son film (comme Tarantino)
– la musique intradiégétique : les musiques que l'on entend de manière directe dans le film (exemples : lorsqu'un personnage écoute une musique à la radio, lorsque les personnages passent devant un orchestre...).
Les compositeurs de musique de film ont principalement deux manières de travailler :
– soit ils ont un rôle dans l'écriture du film, car ils ont une relation privilégiée avec le réalisateur (comme Rob et Rebecca Zlotowski, dont il a écrit toutes les musiques de film)
– soit, « à l'américaine », le film est déjà tourné et monté comme au cinéma, les musiques sont brouillonnes, et les compositeurs doivent composer en imitant ces musiques.
Pour déterminer la musique utilisée dans le film, les compositeurs doivent :
– comprendre le film, les personnages et le jeu des acteurs
– faire attention au rythme, du film comme du plan
Le superviseur musical (qui cherche la meilleure musique possible pour un film) l'aide à rentrer en contact avec les réalisateurs et producteurs. Rob pense que les films fonctionnent par tendances, par modes. Par exemple, dans les années 70, c'était l'heure de la comédie, comme celles avec Louis de Funès, et les musiques de film de Vladimir Cosma.
Traditionnellement, la musique de film est une musique symphonique.
* Comment Rob compose-t-il ?
Tout d'abord, soulignons que Rob compose seul. Il a fait un film avec un autre compositeur et le résultat ne lui a pas plu, il ne retrouvait pas « sa » musique. D'habitude, Rob utilise de la musique 100% électronique, mais il a aussi composé pour un orchestre symphonique avec 60 musiciens, pour le film Planétarium (2016) de Rebecca Zlotowski. Rob a un studio à Paris, où il possède tout le matériel pour pouvoir écouter, composer et enregistrer. Il utilise des logiciels de montage comme Pro Tools, Ableton Live, Logic Pro. Il utilise des banques de sons, avec des voix, des synthé, des pianos... Comme il ne sait quasiment pas lire les partitions, il a appris grâce à son ordinateur, qu'il transporte partout avec lui. Pour composer, il a besoin d'improviser, d'expérimenter : il ne peut pas écrire tout simplement une partition et imaginer le résultat. Il adore les synthés : « la palette est aussi diversifiée sur un synthé que dans un orchestre ». Notons qu'il est parfois difficile de comprendre ce que veut le réalisateur : par exemple, Rob a dû traduire en musique les paroles de Rebecca Zlotowski : « Je veux de l'acier et du cuir ».
* Comment naît une idée ?
Rob nous a montré qu'à partir d'une idée survenue lorsqu'il faisait du vélo, il a composé tout un thème. Il nous a fait écouter l'enregistrement fait grâce au dictaphone de son téléphone. On l'a entendu chantonner, et même faire un rythme de percussions. Après, il nous a fait écouter le morceau que ça a donné, après avoir travaillé dessus. En effet, nous reconnaissions les notes, ainsi que le rythme des percussions. Rob doit faire des démos, ce sont des maquettes, des versions préparatoires et temporaires de musiques, pour pouvoir les proposer au réalisateur.
III. Ses œuvres :
Nous avons pu voir plusieurs extraits de films dont Rob a composé la musique :
Gretel & Hansel d'Osgood Perkins (2020), notes sur la musique : mélange de dégoût et d'attraction
Le Bureau des légendes d'Éric Rochant (depuis 2015), notes sur la musique : répétitions/boucles au violoncelle → mélange hypnotique et incompréhensible
Papicha de Mounia Meddour (2019), notes sur la musique : musique orientale (samples de violons), bruissements des tissus, rapport à la mort, au divin, un peu oppréssant (nous sommes collés à un cadavre) mais c'est un beau recueillement.
Revage de Teddy Grennan (2019), notes sur le film : « c'est le film qui a lancé ceux à tendance féministes gore », musique qui participe à la mise en scène car elle épouse les sentiments du spectateur : la musique et l'audience ne font qu'un, c'est un procédé qui se retrouve souvent dans le cinéma d'horreur (qui est un cinéma de sensations).
Rob nous conseille le film Grand Central de Rebecca Zlotowski (2013), une histoire d'amour dans une centrale nucléaire. La musique y est un peu préhistorique, comme des hommes de cro-magnon : Rob a voulu donner une autre profondeur au film, pour que l'on fasse abstraction de la modernité, et que l'on se concentre sur les sentiments humains.
Rob a été nommé aux Césars pour Populaire de Régis Roinsard (2012), avec Romain Duris. Pour ce film, il a travaillé avec Emmanuel d'Orlando, un autre compositeur. Il n'a pas apprécié l'expérience, c'est pourquoi il travaille seul.
Merci à Rob ainsi qu'à Mme Lemeunier de nous avoir permis de rencontrer Rob et de découvrir le métier de compositeur de musique de film !
Compte-rendu rédigé par Ariane TROUDE