Le vendredi 6 février 2015, les élèves de la section européenne espagnol, de l'option cinéma, et plusieurs classes du lycée Rodin (dans le cadre du cours d'espagnol, de français ou d'histoire) ont assisté à la projection de films espagnols sur la guerre d'Espagne et le franquisme au cinéma l'Escurial, présentés par Pietsie Feenstra, enseignante à l'Université Paris III.
Cette manifestation a été organisée en partenariat avec les Cinémas Indépendants Parisiens et a bénéficié d'une subvention de la Région Ile-de-France.
Les élèves de Terminale de l'option cinéma ont écrit une critique de L'Echine du diable (2001) de Guillermo del Toro.
Un film tendu de bout en bout
Ce film m'a beaucoup plu. Je l'ai
trouvé captivant et bien filmé. J''ai trouvé le jeu des jeunes acteurs
excellent. De plus, j'aime les films qui traitent d'événements historiques, et
même si je ne suis pas amateur de films d'horreur, j’ai trouvé que dans L'Echine du diable, l'histoire et
l'horreur étaient bien mêlées. L'histoire du film nous tient en haleine
jusqu'au bout, de péripétie en péripétie.
Ma scène préférée est située au
début du film, lorsque le jeune garçon, Carlos, se fait embêter par un autre
enfant, Jaime. J'ai bien apprécié le jeu de champ / contrechamp jouant à chaque
fois avec la hauteur du point de vue des enfants. Cela donne une fluidité à
leurs mouvements, ce qui est d'ailleurs renforcé par le fait qu'il s'agit d'un
plan-séquence. Cela donne, dès le début du film, une ambiance tendue qui durera
jusqu'à la fin.
Une histoire de fantômes
Ce
film est un bon thriller dans lequel on retrouve les thèmes chers au
réalisateur, tels que l'enfance, la guerre civile espagnole, ainsi que des
créatures fantastiques. C'est un bon mélange entre le réel et le fantastique,
avec des effets spéciaux réussis, qui accentuent le fait que les créatures
surnaturelles puissent exister. On est pris d'angoisse lorsque Carlos et Jaime
s'approchent du fantôme de Santi. D'ailleurs, les enfants jouent à la
perfection, tout comme les adultes, surtout Jacinto joué par Eduardo Noriega.
Il y a toutes sortes de fantômes entre celui de Santi, la jambe de Carmen
rappelant le fantôme du passé, Casares qui devient un fantôme et dont on
découvre qu'il est le narrateur de l'histoire, et enfin Jacinto qui est hanté
par son passé d'enfant dans l'orphelinat.
Comme
dans Le Labyrinthe de Pan (2006),
Guillermo del Toro utilise ici le fantastique pour délivrer un message
antimilitariste. Ce film montre la cruauté des hommes face à la pureté des
enfants, dans une atmosphère très particulière entre un soleil brûlant et
l'intérieur sombre et froid de l'orphelinat.
La
scène que je préfère est celle de l'explosion de la voiture et des bidons
d'essence dans l'orphelinat, car elle constitue un tournant majeur de l'histoire.
En effet, tous les espoirs reposaient sur cette voiture qui aurait permis aux
personnages de quitter les lieux. Ils sont ainsi anéantis et de nombreuses
morts sont causées. La fuite paraît dès lors impossible. Cette scène est ma
préférée, non pas parce qu'elle est tragique, mais parce qu'elle change la
donne de l'histoire, et montre ainsi qu'en un instant tout peut basculer.
Il
y a une chose en particulier que j'ai beaucoup aimée dans le film, c'est la
façon dont la rivalité entre deux enfants, Carlos et Jaime, se transforme
lentement et subtilement en une solidarité contre un ennemi commun. Tout ce qui
est montré de l'enfance et des rapports entre les enfants échappe aux clichés,
parce qu'on ne montre pas les enfants du point de vue d'un adulte, ce qui
amènerait à une image de l'enfance un peu fausse et stéréotypée. D'ailleurs,
les personnages d'enfants eux-mêmes, au sein du film, se comportent presque comme
des adultes, et c'est impressionnant et touchant.
Je
ne connaissais pas bien l'histoire de la guerre d'Espagne, mais j'ai trouvé que
la montrer à travers ce microcosme du monde des enfants était une bonne manière
de l'aborder et de faire comprendre quelques-uns des enjeux de ce conflit et la
tragédie qu'il a représentée. En effet, la perte des parents, par exemple, nous
fait nous sentir en empathie avec les enfants devenus orphelins.
Ma
séquence préférée est celle de la fin, lorsque le camion a explosé et que
plusieurs enfants sont morts, ainsi que la directrice. Cette séquence est très belle, parce que très émouvante. Les enfants font alors preuve d'un
immense courage et les deux adultes à leurs côtés aussi. Et quand ces deux-là
meurent, il y a une grande tension émotionnelle. C'est le moment du film où
l'on est en totale immersion et de tout cœur avec les personnages. C'est le
type de séquence qu'on pourrait revoir plusieurs fois avec toujours les mêmes
craintes, le même suspense, les mêmes émotions.
Anaé Taounza-Jéminet
Fernando Tielve dans le rôle de Carlos
Le douloureux passage de l'enfance à l'âge adulte
L'histoire
est racontée du point de vue des enfants, car nous sommes le plus souvent avec
eux, ce qui nous permet de comprendre la force qui les unit pour se battre
contre Jacinto. Mais nous suivons aussi les adultes pour voir précisément
l'impact de la guerre sur les habitants, voisins, amis… Le point de vue d'un
adulte existe également quand Jacinto parle de la photo de lui avec ses
parents, car il s'agit de nous montrer qu'il est aussi un objet de la guerre, à
la fois bourreau et victime.
Ce
film montre donc l'impact de la guerre dans ce huis clos qu'est l'orphelinat,
mais il parle aussi de trahison, de regrets (ceux du docteur qui n'a jamais osé
déclarer sa flamme à la directrice), de courage, ainsi que des enfants qui
perdent leur innocence à cause de la guerre, tout en gardant toujours une âme
d'enfant : c'est le cas de Jacinto qui parle de ses parents, ainsi que des
orphelins avec leurs histoires de fantômes, propres à l'imagination des
enfants. Ainsi, ma scène préférée est celle où Carlos voit le fantôme qui le
poursuit jusque dans un couloir, ce qui conduit Carlos à se cacher dans un
placard. J'aime cette scène, car finalement on ne comprend pas si le fantôme le
suit pour en obtenir de l'aide ou pour lui faire du mal. Mais ce qui m'a le
plus plu, c'est l'ambiguïté : c'est une peur qui reste dans le domaine de
l'enfance, puisque, adulte, on n'imagine pas qu'il y ait un fantôme et encore
moins qu'il pourrait nous poursuivre dans la maison.
Enfin,
le film parle de la violence qui nous touche sans qu'on l'ait recherchée. Par
exemple, c'est sans le vouloir que Santi a vu Jacinto essayer d'ouvrir le
coffre, alors qu'il ignorait la présence même de ce coffre. Il est donc mort à
cause d'une chose dont il ne soupçonnait pas l'existence, ce qui est une
manière brutale de passer du monde innocent des enfants à celui, plein de
travers, des adultes.
Emilia-Louise Goléa
Un film fantastique original
L'histoire
se passe dans un orphelinat, ce qui permet aux jeunes spectateurs de s'identifier
aux personnages des enfants. J'ai bien aimé l'intrigue à suspense : le fait que
les enfants soient amenés à découvrir une vérité, en dépit de la tragédie qui
les entoure. Les effets spéciaux sont extrêmement bien faits, ce qui m'a fait
beaucoup apprécier la dimension fantastique du film.
Bien
que ce film soit censé être un film d'horreur, l'univers des enfants laisse
advenir des moments comiques. Le fait que la majorité des scènes se déroulent
dans un même lieu m'a beaucoup captivée, car en général j'adore les histoires
qui se passent dans un lieu fermé qui abrite un mystère, avec peu de
personnages. Néanmoins, dans cet univers innocent des enfants, j'ai bien
apprécié le fait que plusieurs personnages soient sacrifiés (Conchita, Carmen,
le docteur Casarès et plusieurs enfants), car c'était très inattendu et
permettait d'éviter une fin trop heureuse et niaise. D'ailleurs, à la fin, on
ne s'attend pas à ce que la voiture explose vraiment, et le point de vue
subjectif du docteur Casarès, marqué par le bruit sourd et une perception
floue, donne de l'intensité à la scène. De plus, l'incarnation du Mal par le
personnage de Jacinto était parfaite, et l'acteur a très bien interprété ce
rôle.
Par
ailleurs, bien que le contexte historique de la guerre civile en Espagne dans
les années 1930 ne soit pas montré explicitement, il apparaît astucieusement
dans son impact et ses conséquences sur les jeunes enfants de l'époque, ce qui
suscite un attachement et de l'empathie pour eux chez le spectateur.
Enfin,
j'ai apprécié la chute du film, car elle contient énormément de choses : de
l'horreur, du fantastique, du comique, de l'amour… Je le recommande, et c'est
un film que je pourrais revoir plusieurs fois.
Un conte pour grands enfants
J'ai
beaucoup aimé ce film. Tout d'abord, le contexte, la guerre civile espagnole,
ce huis clos qui, au sein de sa petite cour carrée, renferme des enfants, mais
aussi beaucoup de secrets et de mystères. Le fait de choisir comme personnage
principal un enfant tout juste orphelin, même s'il l'ignore encore, permet de
donner au film un sens particulier. En effet, le spectateur se sent plus
concerné et plus touché. De plus, un personnage d'enfant permet de jouer sur
l'innocence, car les enfants sont les premiers touchés par les conflits
orchestrés par leurs parents.
Je
trouve également que le film est admirablement bien construit. Dès le début,
avec une introduction captivante et effrayante à la fois, nous nous posons de
nombreuses questions sur le sens du titre et sur ce que le film va nous montrer
par la suite. Dès lors, nous sommes nous aussi comme des victimes de
l'histoire. Personnellement, j'ai été happée par l'ambiance du film, au point
que j'avais l'impression d'être dans cette cour, où repose l'obus endormi, ou
encore dans cette guérilla des enfants contre l'homme avide d'or.
Cette
histoire de fantômes relève plus, à mon avis, du fantastique que de l'horreur.
Le jeu avec le bassin d'eau m'a fortement angoissée, et le travail sur le
maquillage des acteurs était vraiment impressionnant. Les acteurs, d'ailleurs,
étaient tous très talentueux et je pense qu'ils sont aussi pour beaucoup dans
mon immersion dans le film. Le travail sur la musique est, lui aussi, très bien
réalisé, qu'il s'agisse des focalisations auditives avec brouillage du son, du
jeu avec l'eau qui rend la scène encore plus angoissante, ou encore des motifs
qui accompagnent l'espoir de Carlos ou son désespoir, tout cela permet vraiment
au spectateur de vivre l'instant et d'espérer avec les personnages.
Cependant,
j'ai trouvé la fin un peu trop rapide, laissant derrière elle des choses
inexpliquées. Ainsi, si Casarès était le fantôme depuis le début, pourquoi
avait-il accès à des scènes dans lesquelles il n'était pas présent ? De plus,
j'aurais aimé savoir ce qu'il était advenu des enfants orphelins partis tous
seuls, sans nourriture, sur la route déserte, à plusieurs jours de marche de la
civilisation et en pleine guerre civile. Nous sortons là de l'histoire contée
par Casarès, mais il m'aurait semblé important d'avoir des nouvelles et de ne
pas rester sur une fin joyeuse un peu trop précipitée, éliminant la réalité
historique qui entoure les enfants. Malgré cela, et pour terminer sur un point
positif, j'ai adoré la clôture du film : la chute, qui montre que c'est
l'esprit de Casarès qui raconte l'histoire, est géniale.
Le
personnage de Casarès, en lui-même, est particulièrement intéressant, et plus
précisément la scène dans laquelle son fantôme vient en aide aux enfants. Alors
que j'étais affectée par sa mort, à laquelle je ne m'attendais pas du tout
(j'étais persuadée qu'il resterait présent jusqu'au bout), le voir encore
présent, mais sous une autre forme, m'a vraiment plu, voire émue. Il était
méritant et avait un rôle-clé dans l'histoire, il ne pouvait pas partir sans
aider les enfants qu'il avait choyés quelques jours plus tôt. Quand il
réapparaît, son retour est inattendu, mais salutaire. Les enfants, eux aussi,
peinent à y croire, mais d'une certaine manière, leur innocence permet au
spectateur de vivre à travers leur regard le monde imaginaire où tout peut
arriver, notamment les phénomènes fantastiques qui ne sont censés vivre que
dans l'imagination des hommes. Ainsi, l'esprit errant tient les promesses qu'il
avait faites de son vivant : les aider à vaincre Jacinto et les protéger. Cette
scène est donc très émouvante, à la fois pour les enfants qui comprennent que,
bien qu'ils soient orphelins, ils ne sont pas abandonnés de tous, mais aussi
pour cet homme qui a perdu la femme qu'il aimait et sa propre vie dans un temps
très restreint. C'est sa manière de faire un signe, pour la dernière fois, à ces enfants.
Finalement,
raconté sous la forme d'une histoire fantastique incarnée par des enfants qui
réussissent à vaincre, tous ensemble, Jacinto, le méchant de l'histoire, le film L'Echine du diable sonne comme un conte
que l'on exposerait à de grands enfants, une légende qui parviendrait à happer
les adultes et à les fasciner.
J'ai
apprécié ce film, car il était divertissant et différent des films que nous
voyons en général dans le cadre de "Lycéens au cinéma" (bien que ce
soient toujours de bons films). Les effets spéciaux étaient beaux et
esthétiques, et on sentait bien que la photographie et l'image étaient très
travaillés. Néanmoins, dans son ensemble, je trouve que le film comporte des
éléments trop faciles à trouver et qui ne relèvent pas d'une grande qualité
artistique. Ce film est donc divertissant sur le moment, mais ce n'est pas
vraiment un film marquant.
Un
moment m'a cependant marquée. C'est celui où les élèves font passer une
sorte de test à Carlos, qui doit aller chercher de l'eau en pleine nuit. Il
sort avec un autre enfant mais rencontre malheureusement le surveillant du
pensionnat et reste enfermé quelque temps dans la cuisine, seul, ce qui produit
une forte angoisse chez le spectateur.
Roxane Bergeot
L'Echine du diable ou la tentation du mal
L'Echine
du diable est un excellent film fantastique qui nous projette dans un temps précis
de l'histoire du monde. L'histoire se passe durant la guerre d'Espagne. Carlos, le personnage
principal, a douze ans et son père est décédé. Il arrive dans un orphelinat et
est remis aux bons soins de Carmen, la directrice, et du docteur Casares. Mais
il est confronté à ses camarades et à Jacinto, un employé. Par ailleurs, cet
endroit abrite de l'or et le fantôme d'un ancien pensionnaire, Santi. Il faut
souligner le soin apporté aux détails en commençant par les lieux :
l'orphelinat est en piteux état, à l'instar du pays dans lequel il se trouve. Sa
géolocalisation est également significative : il est isolé, ce qui est une
sorte de métaphore de l'Espagne de l'époque en proie à la guerre, durant
laquelle tout être est renfermé sur soi. Ensuite, le réalisme du maquillage
montre bien le talent et l'expérience de Guillermo del Toro en tant qu'ancien
maquilleur. Les acteurs sont principalement des enfants qui jouent un rôle
majeur dans ce film, car ils représentent notre sensibilité et sont également
un moyen de dénoncer toutes les horreurs que peut produire une guerre ainsi que
ses conséquences sur l'avenir. On a aussi des adultes qui incarnent notre
personnalité, par exemple Carmen, qui est une femme de caractère dotée d'un
instinct maternel, Conchita, qui est la représentation de la personne face à la
tentation et Jacinto, qui incarne tous les aspects attractifs du péché.
Ma scène favorite du film est la mort de Conchita.
Suite à l'explosion de l'orphelinat qui a eu pour conséquence de nombreux
morts, Conchita est en chemin pour aller au village voisin qui se trouve à une
journée de l'orphelinat afin d'obtenir de l'aide. En plein désert, elle croise
sur sa route une voiture dans laquelle se trouve Jacinto, accompagné de ses
compagnons. Jacinto est l'incarnation du mal et du péché, en d'autres termes le
diable sous la forme d'un beau jeune homme. Le mal n'est jamais présenté sous
son vrai visage, mais principalement par les multiples aspects qui pourraient
attirer chacun. Durant cette scène, Conchita lui résiste, elle est la
représentation du spectateur qui tente de lutter face à la tentation. Jacinto
est son fiancé dans le film et cette union représente une facilité et un obstacle
à sa liberté, mais sa résistance la conduit à la mort.
Christ Nselele
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