dimanche 14 février 2016

Festival d'Angers : les critiques des élèves > Léviathan d'Andrey Zvyagintsev

Beaucoup d'élèves ont aimé Léviathan (2014), d'Andrey Zvyagintsev, qui raconte la descente aux enfers de Kolia, tranquille garagiste dans une petite ville du Nord de la Russie, au bord de la mer de Barents, confronté au monstre tentaculaire de la mafia...
Ce film a obtenu le Prix du Scénario au Festival de Cannes 2014.

photogramme extrait de Leviathan



Léviathan, une bonne surprise !

J'éprouvais quelques craintes à l'idée de voir ce film le deuxième soir du festival, pour sa durée et pour son origine, mais comme on dit, il faut se méfier des apparences, et cela s'applique aux films aussi car j'ai été surpris. Je ne me suis pas ennuyé du tout, bien au contraire ! Tous ces moments calmes du film m'ont captivé, que ce soit les plans sur le paysage ou le démarrage du film quand Kolia sort de chez lui pour récupérer Dimitri : le réalisateur pose alors sa caméra et la met en mouvement quand il prend sa voiture. Je n'aurais pas pensé découvrir une région de la Russie aussi éloignée et aussi inconnue. Je l'ai trouvée très belle. On a, par ailleurs, une mise en scène soignée et remarquable, ainsi qu'un jeu d'acteur parfait. 
Le film parle de corruption, un sujet très dur qui parvient à émouvoir le spectateur et à susciter davantage d'attachement aux personnages. On relève également de bonnes touches d'humour 
En bref, j'ai beaucoup aimé ce film :  c'est mon coup de coeur de ce festival !
Jad Charaf




LEVIATHAN, le monstre russe.

     Les premiers plans du film annoncent des paysages grandioses au fin fond de la Russie rurale. Un homme (Vladimir Vdovitchenkov) arrive par le train de Moscou, il est avocat et va défendre son ami Kolia (Aleksey Serebryakov), qui risque de perdre sa maison. En effet, le terrain comporte des avantages et le maire de la ville veut s’en emparer, Kolia et sa famille ne représentant pour lui qu’un obstacle négligeable. Malgré les nombreux appels de Kolia à la justice, celle-ci reste implacable car le combat est, de toute manière, inégal. Les dirigeants ayant de leurs côtés les autorités religieuses, judiciaires et policières, l’issue du combat est prévisible. Le film cherche donc à provoquer chez le spectateur un vif sentiment d’indignation et d’écoeurement face à ce régime plus qu’injuste, barbare. L’histoire s’ancre dans le réel, notamment parce qu’Andreï Zviaguintsev s’inspira d’un fait divers américain.
     Le titre du film n’est pas anodin. Le Léviathan est un monstre biblique qui symbolise le chaos. Il apparaît ici comme une métaphore de l’état russe. Cette idée rejoint l’ouvrage de Thomas Hobbes, Léviathan (1651) dans lequel l’auteur associe le personnage biblique au « symbole d’une puissance démesurée, d’un Etat omnipotent ». C’est exactement le cas dans le film de Andreï Zviaguintsev, qui dresse le portrait d’une ville gangrenée par la corruption et asservie à la toute-puissance des dirigeants. La Russie apparaît comme un pays qui, noyé dans la vodka, a perdu toutes ses valeurs et est voué à l’autodestruction. La violence, l’injustice sont au cœur de Léviathan. C’est peut-être dans cette critique du régime que le film se révèle le mieux. La scène du pique-nique en est l’exemple le plus frappant.En effet, dans cette scène, les personnages (dont deux sont des policiers) se livrent à une partie de chasse pour le moins singulière. Les cibles ne sont pas des oiseaux ou de simples bouteilles mais des grands cadres de photographies de personnages emblématiques de la Russie : on reconnaît parmi eux Lénine. De même, dans le bureau du maire, le spectateur peut voir accrochée au mur la photo de Vladimir Poutine. Ainsi le film va plus loin : dans un régime qui est loin d’être un exemple de démocratie, il associe au maire corrompu et mauvais la figure du président russe.
    Il est surprenant de constater que le film n’a pas été censuré en Russie et qu’à la demande du réalisateur, il a même été financé à hauteur de 35% des coûts de production par le gouvernement. Les deux seules manières d’expliquer cela, ce serait de l’interpréter comme une sorte de défi : pour montrer que le pays peut accepter la critique ; ou comme un choix irrationnel comme le dit le réalisateur : « Quelqu’un n’a pas lu le scénario jusqu’au bout, ce  qui est très probable. »
     Le film atteint son paroxysme dans la scène finale : la maison a été démolie et sur ses ruines, une église a été construite.
    J’ai trouvé que c’était un beau film dans le traitement de l’image, la photographie, qui donne un ressenti de gris, comme si le film avait été entièrement tourné un jour de mauvais temps. Et l’impression de longueur contemplative dans l’histoire m’a séduite. Néanmoins, ce sentiment, s’il est lié à la longueur de certains plans magnifiques de la nature, ou encore marqué par ce long plan-séquence au début du film où la juge rejette l’appel de Kolia, trouve son appui sur le personnage de Lylia (Elena Lyadova) pour laquelle je n’ai pas ressenti d’empathie. Elle est le « personnage-pivot » du film et pourtant il y a une sorte de distance entre elle et le spectateur qui crée un déséquilibre.

Inès Robert-Fisbach


     Léviathan est un film russe réalisé en 2014 par Andrei Zviaguintsev. Le film raconte l'histoire d'un homme, Kolia, très attaché au terrain que son père lui a laissé et à sa maison qu'il a lui-même construite. Seulement, le Maire de la ville décide de lui prendre ses terres et de tout raser afin de reconstruire et il utilise  la justice pour parvenir à ses fins. Kolia demande alors à son ami avocat, Dmitri, de l'aider. Ainsi, Kolia et Dmitri entameront un combat acharné dans le but de gagner le procès contre le Maire, un homme dont les actions sont comparables à celles d'un mafieux. Ayant des preuves des actions illégales du Maire, Dmitri fait alors pression sur lui afin qu'il laisse Kolia, sa femme et son fils tranquilles. Parallèlement à tout cela, Lylia, la femme de Kolia, souhaite une vie meilleure loin de ce lieu tant aimé par Kolia et finit par le tromper avec Dmitri. Lorsque Kolia découvre leur liaison, il menace de les tuer. Puis le Maire donne un avant-goût violent à Dmitri de ce qui pourrait lui arriver s'il n'arrêtait pas de faire pression sur lui, Dmitri propose alors à Lylia de venir à Moscou avec lui, là où il habite, mais Lylia refuse et revient chez Kolia, qui lui pardonne son infidélité. Peu de temps après avoir retrouvé son quotidien, Lylia se jette à la mer. Suite à cela, Kolia sombre dans l'alcool. Suspecté injustement de la mort de Lylia, voyant ses meilleurs amis témoigner contre lui. Kolia est condamné à quinze ans de prison pour le meurtre de sa femme Lylia et comprend alors qu'il a tout perdu. Son fils est adopté par ses meilleurs amis qui ne sont intéressés que par l'indemnité versée par l'Etat, tandis que sa maison finit par être démolie afin que le Maire construise à son emplacement une église Orthodoxe.

    J'ai trouvé que le film était très réussi : les images de la Mer de Barents, au début du film, nous montrent un aspect paisible de la ville où se situe l'histoire, tandis que les mêmes images, montrées à la fin du film, donnent un aspect morbide à l'endroit, c'est donc un début et une fin qui s'opposent.
     Le scénario est accrocheur : dès le début du film j'eu envie de savoir ce qui arriverait à Kolia et sa famille. L'histoire m'a troublée et bouleversée. En sortant de la séance, j'étais même convaincue de ne pas avoir aimé ce film, puis, avec le temps j'ai pris du recul, et me suis rendue compte que je l'avais adoré. Ce n'est pas un film divertissant dans le sens où il ne m'a fait ni rire, ni s'évader, mais plutôt revenir à la réalité. Je qualifierai donc ce film de dénonciateur du gouvernement ainsi que de la justice russe. C'est aussi une grande réflexion sur la religion.
Asline Bettich


Leviathan d'Andrey Zvyaginstev : 
2h30 comme on n'a plus l'habitude d'en passer au cinéma aujourd'hui !

     Film de qualité livré par un certain Andrey Zvyaginstev, Leviathan maîtrise l'histoire qu'il a à nous raconter. De multiples rebondissements scénaristiques, et une photographie lisse, sombre, très esthétique, font de Leviathan un film franchement réussi. Il est aussi très bien interprété : les acteurs se livrent à un jeu de plus en plus dramatique, faisant corps avec leurs personnages aussi différents de caractère les uns que les autres. Ils semblent jouer dans un opéra tragique, ou un film d'Orson Welles, qui serait découpé en deux grandes parties (deux grands actes, en quelque sorte) : l'une nous décrivant la situation initiale et la routine des personnages, l'autre montrant la descente aux enfers des personnages.
     Ce film (découvert à Cannes en 2014) est une pépite tout simplement. Il ne censure rien : tout est dit, tout est nécessaire. De nombreuses prises de risque scénaristiques perturbent le spectateur qui n'est pas habitué à autant de rebondissements. Le film de Zvyaginstev n'est pas seulement un drame familial engendré par un maire corrompu, il exprime également l'engagement du cinéaste. Cela paraît flagrant dans une scène où le maire corrompu, pris de cours par l'avocat venu de Moscou, convoque une réunion de crise avec ses principaux collaborateurs. Dans cette scène, le réalisateur s'amuse, lorsque le personnage du maire sort de ses gonds, à le filmer avec toujours, en arrière-plan, un portrait de Vladimir Poutine. Ceci a pour effet de nous renvoyer aux discours de l'actuel président de la Russie et de créer un comique qui fait réfléchir aux accents totalitaires que ce dernier utilise pour diriger ses concitoyens. Une autre scène qui fait rire, mais aussi réfléchir, c'est celle où le père de famille, invité à l'anniversaire d'un de ses amis, participe à un concours de tir organisé par celui-ci : les cibles sont des portraits d'anciens dirigeants russes (Staline, Lénine...) ! Le réalisateur critique donc les dirigeants russes en général.
     Un film d'une lenteur qui ne nous ennuie pas, bien au contraire, est aujourd'hui très rare. Il faut donc aller voir ce film, car il pourrait bien marquer durablement la cinématographie de notre époque. Alors, vous l'avez compris, réservez votre place maintenant !

Léo Hertz


   J'ai beaucoup aimé ce film, car je trouve qu'il montre beaucoup de problèmes qui existent en Russie et dans le monde en général.
   Nous pouvons voir dans certaines scènes que la corruption, en Russie, est très présente, ainsi que de nombreuses bavures. Par exemple, dans le bureau du maire, il y a le portrait du président de la Russie, Vladimir Poutine, et c'est la corruption qui semble faire le lien entre ce portrait et le personnage du maire, homme puissant et corrompu. De même, lorsque deux policiers tirent sur des portraits d'anciens présidents russes, ils constatent qu'il manque celui du plus récent.
    Ce film nous montre que ces hommes de pouvoir finissent toujours par gagner, car la loi est très compliquée, elle se contredit, mais elle finit toujours par être de leur côté. Ce film montre aussi la vie à la campagne, la pauvreté des habitants, leurs conditions de logement assez précaires, puisque tout le film repose finalement sur l'histoire d'une famille qui veut garder sa maison, plus belle et confortable que celle des autres.
    On peut seulement regretter le fait que ce film, montrant un pouvoir russe corrompu et autoritaire, entretienne à sa manière les clichés sur la Russie.


Aurélien Lornac



J'ai apprécié ce film, même s'il était assez long. J'ai trouvé le décor du film impressionnant, les paysages entourant les personnages étant rendus visibles pour le spectateur grâce à de longues scènes où la caméra fait des panoramiques. Cela nous attache en quelque sorte au milieu de vie du personnage principal, Kolia, qui lui aussi est attaché à son toit, à sa maison. Même si certaines activités reprennent les clichés autour de la Russie, par exemple la vodka ou les Kalashnikov, on apprécie l'originalité des personnages comme le policier, que l'on voit ivre à maintes reprises. Le réalisateur dresse un portrait cauchemardesque de la Russie de Vladimir Poutine où la corruption est omniprésente.


Samuel Rouquette




Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire